Tag : histoire de l’aviation

Moteur Rolls Royce Eagle VIII du Sopwith Atlantic

Moteur Rolls Royce Eagle VIII 12 cylindres du Sopwith Atlantic exposé sur le toit du magasin Selfridges, dans Oxford Street  ©Jacques Hémet

Moteur Rolls Royce Eagle VIII 12 cylindres du Sopwith Atlantic exposé sur le toit du magasin Selfridges, dans Oxford Street ©Jacques Hémet

Une fois de plus, Jacques Hémet nous fait partager une des photos de sa collection personnelle et je l’en remercie. il nous propose un petit défit d’identification sur les circonstances de l’exposition de ce moteur Rolls Royce Eagle VIII. de 550 cv Mais c’est sans compter sur les qualités de fin limier des amateurs de l’histoire de l’aviation que j’ai le plaisir de croiser sur Aéroforum.

Merci à Michael, Jean-Louis et Frank qui ont trouvé l’explication. Il s’agit du moteur de l’avion Sopwith Atlantic avec lequel Harry Hawker, chef pilote d’essai de Sopwith Aviation pendant la Première Guerre Mondiale et K.Mackenzie Grieve , officier de la Marine Royale ont tenté la première traversée de l’Atlantique Nord. Le 18 mai 1919, ils ont décollé de l’Aérodrome de Perle en Angleterre, mais malheureusement  après seulement 1,050 miles, une surchauffe du moteur les força à amerrir. C’est la canalisation du réservoir d’eau alimentant le radiateur qui a été étranglée suite à un choc provoquant la défaillance de celui ci.

Les deux pilotes ont étés repêchés par le bateau danois SS Mary , le 19 mai 1919, mais ce bateau ne possédait pas de radio. C’est donc seulement le 25 mai qu’on a appris que Harry Hawker et Mackenzie Grieve, que tout le monde croyait morts, étaient bien vivants.

Le Sopwith Atlantic n’a pas coulé et été repêché par le SS Charlotteville qui faisait route du Canada vers Danzig. L’épave a été ramenée en Angleterre et exposée sur le toit du magasin Selfridges, dans Oxford Street.

Source des informations :

Jacques Hémet

Aeroforum : http://www.aerostories.org/~aeroforums/forumhist/

Les archives de Flight Global du 29 mai 1919 page 694 à 697

« Our Atlantic Attempt » de H.G. Hawker et K. MacKenzie Grieve


Georges Guynemer, le plus illustre des as de guerre

fejeadggA la vie, à la mort : Georges Guynemer le plus illustre des as de guerre

Tous ceux qui souhaiteraient se remémorer (ou découvrir…) les moments forts de la carrière du plus illustre des aviateurs militaires français, l’as de guerre Georges Guynemer (1894-1917), sont cordialement invités à assister à la conférence que le secteur « Champagne-Ardenne » de l’Association nationale des officiers de réserve de l’Armée de l’air (ANORAA) et l’association Edmond Marin la Meslée proposeront à Reims au début du mois prochain, le vendredi 4 mars, à 19 h 30  centre audiovisuel Saint-Jean- Baptiste de la Salle 20 rue de Contrai- Reims (carton d’invitation sur simple demande par mail).

Pour rappel, c’est dans la Marne, sur le terrain d’aviation de la ferme de Bonne-Maison, que l’as de l’escadrille SPA 3 opéra de mars à juillet 1917, et qu’il y fut promu officier de la Légion d’honneur (le 5 juillet 1917).

Le jeune officier remporta par ailleurs plusieurs de ses cinquante-trois victoires officielles dans les environs de Reims, notamment le 6 juillet 1917, jour où, à la verticale du village de Brimont, il abattit un biplan DFW.

Entrée libre et gratuite, n’hésitez pas à transférer l’information à tous ceux de votre entourage que cette conférence donnée sur le thème de l’aviation de chasse en 14-18 pourrait intéresser !

Pour tout renseignement : 06 44 16 41 27.

Frédéric Lafarge
ancien chargé de relations publiques
de la base aérienne 112 de Reims


Accident du F-AISX dans le port d’Alger

accident CAMS 53 Aeropostale F-AISX alger marseille 22 mai 1929

Dans le port d’Alger le 22 mai 1929, sortie de l’eau de l’épave du CAMS F-AISX @Jacques Hémet

Le mercredi 22 mai 1929 à 5 h 30 du matin le CAMS 53 F-AISX  de la Compagnie Générale Aéropostale  qui devait assurer la liaison Alger-Marseille heurte une épave alors qu’il était en pleine accélération. La coque embarque aussitôt une grande quantité d’eau qui freine brusquement l’hydravion et le fait capoter.

Des cinq personnes à bord, seul  le pilote Max Ringel  sortira indemne, rejoignant la rive à la nage. Le mécanicien André Dupont et le radio Canal ont péri noyés ainsi que les deux passagers, le capitaine Clovis Armani et son épouse Yvonne. Clovis Armani, escrimeur de renom, se rendait à Budapest pour les Championnats d’Europe d’escrime.

Sources des informations :

Jacques Hémet

L’Écho d’Alger du 23 mai 1929 – BNF Gallica


Au capitaine Guynemer, l’Aviation

C’est sur la base aérienne 102 de Dijon – base centenaire de l’Armée de l’air – que se dresse l’un des plus célèbres monuments érigés à la gloire de Georges Guynemer, le héros mythique des ailes françaises. Un aviateur dont il sera beaucoup question en 2017, année qui verra l’Armée de l’air célébrer le centenaire de la fin tragique de l’as « tombé en plein ciel de gloire ».
C’est en 1932 que ce monument fut inauguré, au cours d’une cérémonie qui rassembla sur l’aérodrome militaire bourguignon, outre une foule dense, de nombreuses autorités civiles et militaires, en présence de la mère de l’aviateur et de sa sœur Yvonne.
Georges Guynemer, en tant que porte-drapeau, avait pris part le 13 mai 1916 à une importante cérémonie au cours de laquelle le drapeau de l’Aviation militaire, prestigieux emblème qui avait été remis à l’armée quelques mois plus tôt par le président de la République Raymond Poincaré, fut présenté aux aviateurs du 1er groupe d’aviation de Dijon.
Photo 1

Georges Guynemer sur le terrain d’aviation d’Ouges-Longvic le 13 mai 1916, portant le drapeau de l’Aviation militaire.

Georges Guynemer sur le terrain d’aviation d’Ouges-Longvic le 13 mai 1916, portant le drapeau de l’Aviation militaire.

La guerre terminée, l’as de guerre était devenu un héros légendaire et « officiel » de l’aviation militaire, et une circulaire datée du 25 septembre 1924 avait instauré la tenue chaque 11 septembre, sur tous les aérodromes militaires, d’une cérémonie commémorant sa mort au champ d’honneur et comportant la lecture de sa dernière citation.

En 1928, le colonel Gaston Ludman, commandant du 32e régiment d’aviation mixte de Dijon (formation installée à Dijon depuis 1920), prit la décision de faire ériger en lisière de l’aire d’envol, face à l’entrée du quartier Ferber, un monument à la gloire du héros national entré au Panthéon six ans plus tôt. Pour en assurer le financement, il mit sur pied un comité qu’il chargea de récupérer les fonds nécessaires et lança une souscription publique « pour l’érection du monument commémoratif de la remise au capitaine Guynemer du premier drapeau de l’aviation ».

Photo 2

Le monument peu après son inauguration.

La construction du monument, en pierre du pays, fut confiée à l’entreprise Lonati, qui l’érigea d’après des plans de M. Paris. Quant au buste, encadré de l’inscription « Au capitaine Guynemer, l’Aviation », il fut réalisé par la fonderie Lauterbach Frères de Dijon d’après une sculpture de deux artistes dijonnais, madame Yencesse et son fils. Le lundi 25 juillet 1932, jour de l’inauguration, le colonel Ludman termina son discours inaugural en ces termes « Chaque nuit, un phare fixé à l’intérieur du lanterneau de l’édifice projettera vers le haut une vive lumière, symbole de cette flamme ardente qui anima Guynemer jusqu’à son dernier jour. » Le dernier orateur, le colonel René Geibel, son successeur à la tête de ce qui était devenu le 32e régiment d’aviation d’observation, conclut son discours par ces mots : « L’aviation, fidèle à ses belles traditions que domine le souvenir de l’impérissable silhouette du capitaine Guynemer, vole impassible et sereine vers ses destinées, les yeux fixés sur la plus belle citation qui fût donnée à l’un des siens. » Après les discours, l’effigie de Georges Guynemer fut solennellement dévoilée ; puis les troupes défilèrent pour la première fois devant le monument, qu’encadraient trois avions frappés de la célèbre cigogne symbolisant l’escadrille SPA 3. Enfin, une brillante démonstration aérienne mit un terme à la cérémonie, au cours de laquelle Michel Détroyat, Marcel Haegelen, Louis Massotte, Paulhan, se prêtèrent à des voltiges des plus osées.

L’édifice, épargné par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, sera inauguré une nouvelle fois en 1966, sous le commandement du colonel Bernard de Royer, à l’occasion du cinquantenaire des « Cigognes », en présence des généraux Alfred Heurtaux et Emmanuel d’Harcourt, non sans avoir été préalablement rénové et transformé en obélisque par la suppression du lanterneau sommital. Il sera enrichi, pour l’occasion, d’une plaque gravée de la célèbre citation attribuée à titre posthume à l’as de guerre aux cinquante-trois victoires officielles, choisi quelques années plus tôt par les aviateurs dijonnais pour être le parrain de la base aérienne 102.

Stèle Guynemer, le 15 mars 2015

Le monument Guynemer de nos jours.

En mai 2016, quelques semaines avant d’être dissoute, la base aérienne 102 rendra hommage au plus illustre des as et célébrera les cent ans de sa venue à Dijon. Elle organisera du lundi 9 au samedi 14 mai une « Semaine Guynemer » qui comportera, principalement, une exposition (Archives départementales de la Côte-d’Or), un concert (Dijon), une conférence (Ouges), une cérémonie militaire (BA 102) et un « événement philatélique » (Longvic). Frédéric Lafarge, délégué au patrimoine historique de la BA 102 de Dijon.


BA 102 : UN AS POUR PARRAIN

« Oui, il y a des limites aux forces humaines : des limites qu’il faut toujours dépasser ! »
(Georges Guynemer, neuf jours avant sa mort)

 

Depuis plus d’un demi-siècle, le nom d’un illustre pilote de chasse cher au cœur des aviateurs de l’Armée de l’air est associé à la base aérienne 102 de Dijon (1) : celui de l’as Georges Guynemer, mort pour la France en combat aérien le 11 septembre 1917, dont la dernière citation est lue solennellement sur toutes les bases aériennes à chaque anniversaire de sa disparition, officiellement depuis 1924 (2). Mais qui fut ce « héros légendaire tombé en plein ciel de gloire » dont le souvenir est perpétué, localement, par un monument érigé en 1932 à l’intérieur même de l’enceinte de l’aérodrome militaire ?
Georges Guynemer naquit le 24 décembre 1894 à Paris (3). En 1903, sa famille, issue de l’aristocratie et domiciliée en Normandie, au Thuit (Eure) (4), vendit son château (5) et alla s’installer à Compiègne (6). Enfant, le jeune Georges, chétif, ne fut jamais en bonne santé et il fallut que son père, ancien officier issu de l’École spéciale militaire de Saint-Cyr, luttât pour que son fils unique (7), choyé parce que fragile, « devienne un homme ». Doué mais dissipé voire turbulent, il fut envoyé à Paris en 1906 pour y étudier au collège Stanislas (8), où il obtint son baccalauréat en 1912, avec le projet d’y préparer le concours d’entrée à l’École polytechnique.

 

Georges Guynemer

Georges Guynemer dans son premier uniforme : celui du collège Stanislas, prestigieux établissement privé d’enseignement catholique parisien où il étudia à partir de 1906.

La maladie vint toutefois compromettre ces projets et la guerre éclata, début août 1914, alors que la famille Guynemer, en raison de la santé médiocre du jeune homme, s’était retirée quelques mois plus tôt sur la côte atlantique, près de Biarritz, dans la station balnéaire d’Anglet (Basses-Pyrénées) (9). Il voulut aussitôt s’engager dans l’armée, mais cela lui fut refusé – et à plusieurs reprises, en dépit des relations de son père – pour faiblesse de constitution (10). C’est par l’école d’aviation militaire de Pau – qu’il intégra le 22 novembre « au titre du service auxiliaire comme élève mécanicien d’avion » grâce à la bienveillance de son commandant, le capitaine Alphonse Bernard-Thierry, que Georges Guynemer, fasciné depuis sa plus tendre enfance par l’aviation (11), parvint à intégrer l’armée, plus spécialement l’Aéronautique militaire (12). « Je suis soldat. J’espère aller dans les deux mois au feu… » Appuyé par le commandant de l’école, le jeune engagé volontaire pour la durée de la guerre écrivit le 23 décembre une demande au ministre de la Guerre pour devenir élève-pilote : « J’ai l’honneur de vous demander de bien vouloir m’admettre dans le personnel navigant comme élève pilote. J’ai déjà exécuté des vols comme passager. ». L’armée y répondit favorablement, et Georges Guynemer vola pour la première fois début mars 1915. Il fut breveté pilote militaire peu après, le 26 avril (13), après avoir intégré le 20 mars l’école de pilotage du camp d’Avord (Cher). « Il était très nerveux, très excité. Seulement il aimait ça, il ne jurait que par l’aviation, c’était un mordu ! » a raconté Paul Tarascon, qui fut son instructeur à l’école de Pau.Après un très bref passage par la réserve générale d’aéronautique du Bourget pour s’y entraîner sur son avion d’arme et y attendre de connaître son unité, Georges Guynemer fut affecté au sein d’une escadrille dans laquelle il devait servir durant toute la guerre : la MS 3 (14) commandée par le capitaine Antonin Brocard, formation qui s’apprêtait à se couvrir de gloire – jusqu’à devenir la plus glorieuse des ailes françaises de 14-18 – et qu’il intégra le 9 juin, peu après avoir été nommé caporal, alors qu’elle était stationnée à Vauciennes (Oise). « Le gosse de vingt ans était chic, très chic, d’une mise élégante, même recherchée, qui, je l’avoue, produisit sur moi un effet désastreux. » a raconté l’adjudant Charles Védrines, qui l’accueillit à son arrivée à l’escadrille. Le sous-officier le prit pourtant sous son aile, et ne ménagea pas ses efforts pour que ce jeune pilote de dix-neuf ans, qui « cassa du bois » à ses débuts dans l’unité, perfectionnât son pilotage. Au gré de la modernisation de son parc, la MS 3 deviendrait successivement l’escadrille N 3 (15) puis la redoutable SPA 3 (16) dite « des Cigognes » en raison du symbole – une « cigogne d’Alsace à l’envol, aux ailes basses en fin de battement » – qui serait peint à partir de juin 1916 sur le fuselage de ses avions. Georges Guynemer, aux commandes d’un Morane-Saulnier « Parasol » équipé d’une mitrailleuse Lewis montée sur affût mobile, remporta sa première victoire le 19 juillet 1915 contre un Aviatik, biplan que l’observateur Charles Guerder, qui actionnait la mitrailleuse de l’avion, descendit, et qui s’écrasa dans les lignes ennemies au sud de Soissons (Aisne) (17). Une victoire qui valut à celui qu’on surnommait le « Gosse » – et parfois « Fil de fer » – l’attribution de la Médaille militaire (18) et… le respect de ses camarades pilotes : « Il me semble qu’au début ils le prenaient pour un jeunot, un « blanc-bec » sans expérience. Il paraissait si jeune et si frêle ! Il avait l’air malade. Mais dès qu’il a abattu son premier avion allemand […], il me semble qu’on commença à le considérer mieux. De mieux en mieux, au cours de ses exploits. » a rapporté une habitante de Vauciennes (19).

Georges Guynemer et le soldat Charles Guerder

Photographiés devant leur Morane-Saulnier « Parasol » : le caporal Georges Guynemer et le soldat Charles Guerder (blessé à la main droite), peu après leur victoire du 19 juillet 1915, remportée contre un Aviatik. Un exploit qui valut aux deux aviateurs de la MS 3 – l’un pilote et l’autre « mécanicien mitrailleur » – la Médaille militaire et la croix de guerre avec palme de bronze.

 

Ses succès, Georges Guynemer les remporta en général en appliquant une technique imparable : s’approcher au plus près de l’ennemi pour l’abattre d’une courte rafale, méthode efficace mais néanmoins risquée car exposant plus que de raison au tir défensif du mitrailleur arrière de l’avion pourchassé et qui, bien des fois, valut à l’intrépide pilote de revenir au terrain avec son appareil gravement endommagé. Après avoir abattu le 5 décembre un autre Aviatik au nord de Bailly (Oise), avoir tiré trois jours plus tard, à vingt mètres, sur un avion tombé au sud de Roye (Somme) et avoir atteint le 14 décembre suivant, avec le sergent Louis Bucquet, un Fokker qui s’écrasa au sud-est de Noyon (Oise), la croix de chevalier de la Légion d’honneur lui fut décernée (20), le 24 décembre, jour de ses vingt-et-un ans (21). Puis les victoires s’enchaînèrent : trois victoires dans la seule journée du 3 février 1916 (22), un biplan LVG tombant en flammes le surlendemain, un avion abattu le 8 février… Le 12 mars, le jeune as de guerre (23) dut toutefois quitter Breuil-le-Sec et le secteur tenu par la VIe armée : il fut retenu pour être détaché avec les meilleurs pilotes de son escadrille pour prendre part à la bataille de Verdun (24) ; il y abattit aussitôt un nouvel avion. Au moment de ce transfert, l’aviateur totalisait déjà huit victoires officielles et avait par ailleurs participé à deux missions spéciales « importantes, difficiles et particulièrement périlleuses » visant à déposer un espion à l’arrière des lignes ennemies (25). Cependant, le lendemain de son arrivée sur les bords de la Meuse, l’as flirta avec la mort : en combat, il fut grièvement blessé, recevant deux balles qui lui traversèrent le bras gauche et, dans la mâchoire, un fragment de métal du pare-brise de son chasseur ; il fut aussi victime de plusieurs contusions au visage et au cuir chevelu. Le jeune officier fut évacué sur Paris où on le soigna à la mission médicale japonaise installée sur les Champs-Elysées, dans l’hôtel Astoria. Quelques jours auparavant, le 4 mars, il avait été nommé sous-lieutenant, à titre temporaire.
Georges Guynemer le 13 mai 1916

Georges Guynemer, encore convalescent, photographié le 13 mai 1916 près de Dijon, sur le « camp d’aviation d’Ouges-Longvic ». Ce jour-là, l’officier de la N 3, âgé de vingt-et-un ans et déjà as de guerre aux huit victoires homologuées, prit part en tant que porte-drapeau à une importante prise d’armes au cours de laquelle il eut le privilège de porter un prestigieux emblème qui fut présenté aux troupes : le drapeau de l’Aviation militaire.

Le 13 mai, convalescent, il prit part à Dijon, sur l’aérodrome d’Ouges-Longvic, à une importante prise d’armes au cours de laquelle, en tant que porte-drapeau, il reçut un prestigieux emblème : le drapeau de l’Aviation militaire. Totalement remis, il put rejoindre son escadrille peu après et prendre part à la bataille de la Somme à partir du terrain de Cachy, à l’est d’Amiens, théâtre où, de juin 1916 à janvier 1917, il ajouta une vingtaine de victoires sûres à son palmarès. C’est au cours de cette période que le jeune officier sortit miraculeusement indemne d’une terrible « méprise » : le 23 septembre, son appareil fut touché de plein fouet par un obus français en repassant sur les lignes et chuta de 3 000 mètres. « Je suis venu m’effondrer à quelques mètres de leur batterie. Ils ont été terriblement navrés, et c’est moi qui ai dû leur remonter le moral. […] Tout de même, ce fait prouve que nos pièces antiaériennes sont adroites. Atteindre un SPAD à 3 000 mètres, c’est de la précision ou je ne m’y connais pas ! » Il fut promu au grade de capitaine le 18 février 1917, époque où la SPA 3, avec les autres escadrilles composant le groupe de chasse n° 12 créé à l’automne précédent, se trouvait basée en Lorraine, à Manoncourt-en Vermois, pour assurer la protection de Nancy.

Le sous-lieutenant Guynemer en juillet 1916, devant son Nieuport 17

Le sous-lieutenant Guynemer en juillet 1916, devant son Nieuport 17 (dont l’hélice est brisée). Un an seulement après avoir remporté son premier succès, l’aviateur avait déjà une dizaine de victoires certifiées à son actif.

Georges Guynemer, qui a combattu jusque-là sur plusieurs types d’avions (s’il débuta sur biplace Morane-Saulnier « Parasol », il vola ultérieurement sur Nieuport 10 (26), sur Nieuport 17 (27) puis sur Spad VII (28), avion avec lequel il remporta bon nombre de ses victoires), se passionnait dans le même temps pour la technique et, en lien avec Louis Béchereau, ingénieur en chef des ateliers de la firme SPAD, il s’investit dans la mise au point d’un avion révolutionnaire par son armement, qu’il surnommait familièrement son « avion magique » : le Spad XII-Canon, appareil dont le moteur Hispano-Suiza fut adapté pour être traversé par le tube d’un canon Hotchkiss de 37 millimètres tirant par le moyeu de l’hélice (29), qu’il pilotera pour la première fois le 5 juillet 1917 et avec lequel il franchira le cap symbolique des cinquante victoires certifiées. Fut également mise au point avec son concours une « ciné-mitrailleuse » (30).
Georges Guynemer, début 1917

Un « as en majesté » : Georges Guynemer, début 1917. Sur la poitrine de l’as, sous l’insigne de la SPA 3, les trois plus prestigieuses décorations françaises : la croix de chevalier de la Légion d’honneur, la Médaille militaire et une croix de guerre déjà « chargée » d’une quinzaine de palmes de bronze.

En juillet, après avoir pris part au printemps à l’offensive Nivelle dite « du Chemin des Dames », la SPA 3 mit le cap sur la mer du Nord et s’installa dans les Flandres, front sur lequel « le meilleur et le plus audacieux des pilotes de combat français » (31) s’illustra, à partir de l’aérodrome de Bergues (Nord), devenant grâce aux journaux – qui prirent l’habitude de rapporter chacun de ses exploits – le plus célèbre des héros de la chasse française. La lutte y fut toutefois acharnée et l’intrépide pilote, promu un peu plus tôt, le 5 juillet, officier de la Légion d’honneur sur le terrain de Bonne-Maison situé près de Fismes (Marne) par le général Louis Franchet d’Espèrey commandant le groupe d’armées du Nord, fut à plusieurs reprises « descendu », ce qui lui valut d’apparaître surmené, nerveux, voire même « tourmenté ». « C’est fatal, je ne m’en sortirai pas… » confia-t-il le 28 août au vicaire de l’église Saint-Pierre-de-Chaillot de Paris. Quelques jours après que lui ait été confié le commandement de « son » escadrille en remplacement du capitaine Alfred Heurtaux, grièvement blessé en combat aérien le 3 septembre, Georges Guynemer disparut, tué en combat aérien le 11 septembre 1917, vers 9 h 30, d’une balle dans la tête, près de Poelkapelle (Belgique) (32). Son SPAD XIII (33), qui avait décollé une heure plus tôt du terrain de Saint-Pol-sur-Mer (34) situé près de Dunkerque (Nord), s’écrasa dans le no man’s land, où la dépouille de l’aviateur fut formellement identifiée par un soldat allemand (35) – le visage de Guynemer étant demeuré intact – peu avant que l’appareil et son pilote ne soient pulvérisés par le feu de l’artillerie britannique. Georges Guynemer, qui était parti en patrouille avec le sous-lieutenant Jean Bozon-Verduraz, avait repéré un Rumpler et aussitôt foncé en direction du biplan. Son compagnon avait suivi, mais avait dû engager le combat avec plusieurs Fokker et, après être resté seul dans le ciel et avoir attendu son chef, il avait dû se résoudre à s’en retourner au terrain… où le commandant de la SPA 3 n’était pas rentré… et où le Vieux-Charles (36) ne reparut jamais. « Il m’avait juré quelques jours auparavant que les Allemands ne l’auraient pas vivant. » a écrit le chef de bataillon Brocard. Georges Guynemer, dont la disparition ne fit la une des quotidiens que le 26 septembre (37), n’avait pas vingt-trois ans (38)
La dernière photographie du capitaine Georges Guynemer, prise le 10 septembre 1917

La dernière photographie du capitaine Georges Guynemer, prise le 10 septembre 1917 – la veille de sa mort – vers 18 h 30 par le sergent pilote Louis Risacher, montrant le jeune commandant de la SPA 3 avec Parasol, le chien de son camarade Albert Deullin, lui-même as de guerre. Quinze heures : voilà tout ce qu’il reste de vie à Georges Guynemer, de plus en plus lucide quant à l’issue de ses duels aériens.

Sa vingt-sixième – et dernière – citation à l’ordre de l’armée, qui lui fut décernée le 16 octobre 1917 par ordre général n° 50 signé du général François Anthoine, est la plus connue de toutes : « Le général commandant la 1re armée cite à l’ordre de l’armée le capitaine Guynemer, commandant l’escadrille n° 3. Mort au champ d’honneur le 11 septembre 1917. Héros légendaire, tombé en plein ciel de gloire, après trois ans de lutte ardente. Restera le plus pur symbole des qualités de la race : ténacité indomptable, énergie farouche, courage sublime. Animé de la foi la plus inébranlable en la victoire, il lègue au soldat français un souvenir impérissable qui exaltera l’esprit de sacrifice et les plus nobles émulations. »

 

Crédité au moment de sa mort de cinquante-trois victoires homologuées – dont huit doublés, un triplé (39) et… un quadruplé (40) – et de vingt-neuf probables, Georges Guynemer figurait à la première place au classement général des as français, ce qui lui valait de porter le titre envié d’as des as (41). Il portait une croix de guerre « surchargée » de palmes de bronze ainsi que plusieurs prestigieuses décorations étrangères (42). Avant qu’il ne s’envole pour sa mission fatale, il totalisait 665 heures et 55 minutes de vol.
Le 19 octobre 1917, la Chambre des Députés proposera (43) que le nom de Guynemer soit inscrit au Panthéon, « temple des gloires françaises », et une plaque « À la mémoire de Georges Guynemer, symbole des aspirations et des enthousiasmes de l’armée de la Nation » y sera dévoilée le 30 avril 1922 par Raymond Poincaré, président du Conseil. Le 8 juillet 1922 sera inauguré à Poelkapelle le premier – et le plus connu – des monuments élevés à sa mémoire : un monument surmonté d’une cigogne portant le texte de la dernière citation attribuée à l’as et un hommage des aviateurs belges (44). Le 13 novembre suivant, Compiègne inaugurera un monument, œuvre du sculpteur Henri Navarre, à la gloire du plus illustre de ses « enfants ». Dix ans plus tard, la future « base aérienne 102 » de Dijon se dotera à son tour de son monument (45) et, en 1934, Malo-les-Bains, d’où l’as décolla pour la dernière fois, fera de même. Le 3 avril 1948, le secrétaire d’État à l’Air André Maroselli remettra la fourragère de l’as sera solennellement remise à l’École de l’air (46) de Salon-de-Provence où, quelques années plus tard, un monument en forme d’arc sera élevé, gravé de la devise personnelle de l’aviateur : « Faire face. »
monument édifié à la gloire du capitane Guynemer à Poelkapelle

Le plus célèbre des monuments édifiés à la gloire du capitane Guynemer : celui de Poelkapelle, ici photographié en 1967, lors de la cérémonie organisée pour célébrer les cinquante ans de la disparition de l’as de guerre.

À deux ans de la célébration du centenaire de la disparition du plus célèbre des as de guerre, Georges Guynemer demeure un exemple vivant pour tous les aviateurs de l’Armée de l’air, qui ne l’ont pas oublié et honorent toujours sa mémoire.
© Frédéric Lafarge, délégué au patrimoine historique de la BA 102 (septembre 2015).
Sources :
Article rédigé grâce aux deux principales biographies consacrées à Georges Guynemer, qui sont l’ouvrage Vie héroïque de Guynemer, le chevalier de l’air publié en 1918 chez Plon par l’académicien Henry Bordeaux et celui écrit par Jules Roy, ancien officier de l’Armée de l’air, qu’Albin Michel édita en 1986 (Guynemer : l’ange de la mort), ainsi qu’à l’aide du livre Guynemer et ses avions de Myrone N. Cuich paru en 1980 et de l’article « Georges Guynemer, chasseur de gloire » écrit par David Méchin et paru dans les numéros 507 et 508 du magazine Le Fana de l’Aviation (février et mars 2012). Ont aussi été utilisés divers documents tirés de plusieurs fonds d’archives, notamment ceux du département Air du Service historique de la Défense (Vincennes), du bureau des archives et des réserves de l’Armée de l’air (Dijon), du musée de la base aérienne 102 (Dijon) et de l’ancien musée de la base aérienne 112 (Reims). Remerciements au journaliste et historien Jean-Marc Binot, auteur d’une biographie de Georges Guynemer à paraître en 2017 aux Éditions Fayard.
 Notes :
(1) : Privilège qu’elle partagea, à compter du 2 juillet 1984, avec un illustre site militaire parisien : la Cité de l’Air, siège de l’état-major de l’Armée de l’air.
(2) : Conformément aux dispositions d’une circulaire ministérielle datée du 25 septembre 1924 relative à la « commémoration du souvenir du capitaine Guynemer » et prévoyant la tenue d’une prise d’armes annuelle dans les formations de l’Aéronautique militaire, avec lecture de la « citation posthume » de l’as (hommage qui, dans les faits, fut rendu à Georges Guynemer dès 1918).
(3) : Au numéro 89 de la rue de la Tour (16e arrondissement), à 10 h 30, de Paul Achille Anatole Guynemer (1860-1922) et de Julie Noémie Doynel de Saint-Quentin (1866-1957) « domiciliés au Thuit près Les Andelys ».
(4) : Commune des bords de la Seine où le souvenir de l’as de guerre est conservé par un vitrail – représentant saint Georges terrassant le dragon – qui fut inauguré en 1928 dans l’église Saint-Martin, où le jeune Georges reçut le baptême le 27 octobre 1895.
(5) : Edifié au milieu du XIXe siècle par Achille Saint-Ange Guynemer, arrière-grand-père de Georges, sur les ruines de la demeure qui fut habitée jusqu’à sa mort en 1792 par le chancelier et Garde des sceaux de France René Nicolas de Meaupou.
(6) : Dans une bâtisse qui existe toujours, au numéro 112 de la rue Saint-Lazare.
(7) : Troisième et dernier enfant, après deux filles : Odette, morte de la grippe espagnole en 1918, et Yvonne, qui épousera en 1925 le vicomte Jean de Villiers de la Noue et décédera en 1976.
(8) : Établissement privé d’enseignement catholique implanté rue Notre-Dame-des-Champs (6e arrondissement), où un haut-relief de marbre sculpté par l’artiste Armand Roblot, inauguré en 1922, rappelle le souvenir de cet ancien élève. Georges Guynemer en fut pourtant exclu pour indiscipline au cours de l’année scolaire 1913-1914, après avoir giflé l’un de ses professeurs.
(9) : À la « Villa Delphine », bâtisse donnant sur l’océan, où une plaque rappelle le souvenir de Georges Guynemer.
(10) : Fin 1914, Georges Guynemer, qui mesure 1,73 mètre, ne pèse guère plus de 50 kg.
(11) : Notamment depuis le 11 juin 1911, jour où il s’est émerveillé de voir passer un aéroplane au-dessus de son école, enthousiasme confirmé un an plus tard, à l’été 1912, par un baptême de l’air effectué à l’école de pilotage de Corbeaulieu, près de Compiègne, à bord d’un biplan Farman.
(12) : Ce qui fut rendu possible par l’établissement d’un faux, comme l’ancien commandant de l’école de Pau s’en est expliqué : « Le bureau de recrutement [de Bayonne] ne devait engager pour l’aviation que des spécialistes, et non pas n’importe qui. La seule solution possible était de lui délivrer un certificat d’examen professionnel de mécanicien, certificat que je signai séance tenante, accompagné d’une autorisation régulière de s’engager au titre du service auxiliaire comme mécanicien d’avion [….]. »
(13) : Lui fut attribué le brevet de pilote militaire n° 853, qu’il obtint après avoir réussi sur Morane-Saulnier à moteur de 60 chevaux d’une part l’épreuve « triangulaire » (organisée le 22 avril entre Avord, Châteauroux et Romorantin) et, d’autre part, les épreuves « de lignes droites et hauteur » (qui se déroulèrent entre Avord et Étampes le 26 avril). Georges Guynemer avait obtenu le 1er avril, sur monoplan Blériot, son brevet de pilote-aviateur civil, délivré par l’Aéro-club de France (n° 1832).
(14) : Escadrille créée en 1912 en tant que Bl 3 (dotée de biplaces Blériot) et originellement vouée à la reconnaissance aérienne.
(15) : La lettre N renvoyant aux appareils de la marque Nieuport, produits par la Société anonyme des Établissements Nieuport.
(16) : L’acronyme SPA renvoyant aux avions de la marque SPAD, produits par la Société pour l’aviation et ses dérivés (ancienne Société de production des aéroplanes Deperdussin, fondée avant-guerre par l’avionneur Armand Deperdussin).
(17) : Combat au cours duquel le « mécanicien mitrailleur » fut blessé, une balle ayant transpercé sa main gauche.
(18) : Décoration qu’il reçut le 21 juillet 1915, au lendemain de sa nomination au grade de sergent, des mains du général Pierre Dubois commandant la VIe armée.
(19) : Madame Berthe Choquart, qui avait une vingtaine d’année en 1915 et chez qui logeait le commandant de la MS 3 : « J’ai habité chez ma mère pour laisser mon appartement au capitaine Brocard. » Georges Guynemer résidait, quant à lui, chez la propre grand-mère de cette dame : « Ma grand-mère l’hébergeait, et prenait soin de ses affaires. »
(20) : Lui fut aussi octroyée onze jours plus tard, le 4 janvier 1916, la Grande Médaille d’Or de l’Aéro-Club de France.
(21) : Et donc de sa majorité civile.
(22) : L’une d’elles n’a pas été homologuée.
(23) : Officiellement depuis le 3 février 1916, jour où il remporta contre un biplan LVG sa cinquième victoire homologuée.
(24) : Depuis le terrain de Vadelaincourt, et sous la férule du « père de l’aviation de chasse », le chef d’escadrons Charles de Tricornot de Rose, sommé par le général Philippe Pétain, commandant de la IIe armée et chargé de la défense de la ville, de « balayer le ciel de Verdun ».
(25) : Effectuées le 23 septembre et le 1er octobre 1915.
(26) : Appareil doté d’une mitrailleuse fixe tirant au-dessus du plan supérieur de l’avion.
(27) : Appareil doté d’une mitrailleuse dont le tir était synchronisé avec la rotation de l’hélice.
(28) : L’un d’eux, le Spad VII n° S 254, qui fut son dernier Spad et celui avec lequel il remporta dix-neuf victoires, est exposé au Musée de l’air et de l’espace du Bourget.
(29) : Bien qu’offrant une puissance de feu remarquable, ce canon ne pouvait tirer qu’un seul coup à la fois et devait être chargé manuellement en vol. En outre, son recul était important lors du tir et celui-ci remplissait l’habitacle de fumée.
(30) : Comme Louis Béchereau l’a expliqué : « Guynemer voulait à tout prix un appareil pour photographier les balles traçantes de ses mitrailleuses, afin d’en vérifier les trajectoires. Pour lui faire plaisir, j’ai pris contact avec les frères Kodak et nous avons mis au point ensemble l’appareil photographique en question. »
(31) : Qualificatifs attribués à Guynemer par le chef de bataillon Antonin Brocard, commandant du groupe de chasse n° 12, dans une note datée du 1er juin 1917 faisant également état des « prodigieuses aptitudes actuelles » de l’aviateur : « la confiance en lui, le coup d’œil, l’adresse de tir, l’habileté de pilotage et la précision de manœuvre ».
(32) : Aujourd’hui Langemark-Poelkapelle, commune formée par fusionnement de la province de Flandre-Occidentale.
(33) : Avion armé de deux mitrailleuses synchronisées tirant dans le champ de l’hélice.
(34) : Commune dans laquelle Georges Guynemer, qui « logeait en ville », passa sa dernière nuit, comme le rappelle une plaque visible depuis 1957 au numéro 192 de la rue de la République.
(35) : Le Feldwebel Theodore Ziegler du 413e régiment d’infanterie (Stuttgart), qui reconnut Georges Guynemer à l’aide de la photographie dont disposait le brevet de pilote de l’as de guerre, trouvé dans son portefeuille. En 1938, la « carte d’identité de pilote d’avion » de Guynemer sera rendue à la France par les autorités du Reich.
(36) : Nom dont Georges Guynemer baptisa tous les avions qui lui furent attribués.
(37) : Après avoir été annoncée officiellement la veille par le ministère de la Guerre.
(38) : Le « décès constant » du « capitaine aviateur Georges, Marie, Ludovic, Jules Guynemer » sera déclaré par le tribunal civil de Compiègne par jugement du 26 mars 1919, jugement dont la transcription sur les registres de l’état-civil de la mairie de Compiègne sera faite le 8 octobre 1919.
(39) : Le 16 mars 1917, prouesse encore jamais réalisée dans l’aviation de chasse. « Un [avion] par galon ! »
(40) : Remporté le 25 mai 1917.
(41) : Titre qui échut, à sa mort, à l’as Charles Nungesser, pilote de l’escadrille SPA 65. À la fin de la guerre, Georges Guynemer figurerait à la deuxième place au palmarès des as de la chasse française, ayant été rejoint puis dépassé par le lieutenant René Fonck de l’escadrille SPA 103, titulaire de soixante-quinze victoires certifiées.
(42) : Georges Guynemer, qui s’était vu remettre la croix de guerre belge, avait aussi été fait officier de l’ordre de Léopold (Belgique) et compagnon de l’ordre du Service distingué (Royaume-Uni) ; il avait également été décoré de la croix de l’ordre impérial et militaire de Saint Georges (Russie), de la croix de 2e classe de l’ordre de Michel le Brave (Roumanie), de l’épée de 4e classe de l’ordre de l’Étoile de Karageorge (Serbie), de l’ordre militaire de la Tour et de l’Épée de Valeur, Loyauté et Mérite (Portugal) et de l’ordre du prince Danilo Ier (Monténégro).
(43) : Proposition à laquelle le Sénat, à l’unanimité, se ralliera le 25 octobre 1917.
(44) : Il est rédigé en ces termes : « Sur ce coin de terre belge ravagé par la guerre, tomba pour la défense du droit violé, un héros français, Georges Guynemer, dont les ailes victorieuses conquirent à vingt ans une gloire incomparable dans le ciel des combats. Les aviateurs belges qui eurent l’honneur de lutter à ses côtés ont élevé ce monument en témoignage de leur admiration, née de la fraternité des armes. »
(45) : « Monument commémoratif de la remise au capitaine Guynemer du premier drapeau de l’aviation » qui fut érigé par souscription publique à l’initiative du 32e régiment d’aviation et inauguré le 25 juillet 1932. Ce monument orné d’un bronze montrant l’as vu de profil, œuvre du sculpteur et graveur en médailles dijonnais Ovide Yencesse, sera de nouveau inauguré en 1966, pour les cinquante ans des « Cigognes », après avoir été rénové et transformé en obélisque, son lanterneau sommital ayant été supprimé.
(46) : École dont la première promotion, celle de 1935, fut baptisée « promotion capitaine Guynemer ».

Restauration de l’entrée de l’Aéroparc Louis Blériot au Buc

Restauration de l’entrée de l’Aéroparc Louis Blériot à Buc ©Toni Giacoia

En 2009, à l’occasion du centenaire de la traversée de la Manche par Louis Blériot, la réalisation d’un ouvrage très documenté « Buc à travers l’aviation » et le don d’un Mirage III (visible avenue Jean Casale) de la part de la société SECAMIC,  a permis à la commune de Buc de revenir sur son  riche passé aéronautique.

Mirage III avenue Jean Casale à Buc ©Toni Giacoia

En 2012, la commune de Buc souhaitant valoriser son patrimoine aéronautique organise un projet de restauration de la porte de l’Aéroparc Blériot située avenue Guynemer. La documentation historique très importante permet sans soucis une restitution fidèle de cette porte monumentale.
Début septembre de cette année, on peut constater que les travaux ont commencé.

À la mémoire de Jean Casale

Dans un même temps, la statue érigée à la mémoire de Jean Casale (1893-1923), As de la 1ere guerre mondiale et pilote d’essai aux établissements Blériot, sera aussi restaurée car les outrages du temps ont malheureusement fait leur effet.

 Le mirage III aurait lui aussi bien besoin d’une nouvelle peinture !

Vous pouvez participer à la restauration de cet élément important de l’histoire de l’aviation en faisant un don déductible à 60% des impôts sur le revenu par l’intermédiaire de la fondation du patrimoine. Le projet est accessible en suivant ce lien : https://www.fondation-patrimoine.org/fr/ile-de-france-12/tous-les-projets-593/detail-aeroparc-louis-bleriot-de-buc-13201 et il est possible de télécharger le formulaire de don à cette adresse : http://www.mairie-buc.fr/images/stories/newsletter/novembre2012/bulletin_de_souscription_BUC.pdf.

La traversée de la Manche réalisée avec succès le 25 juillet 1909, à bord de son Blériot XI (qui est toujours  exposé au Musée des Arts et Métiers),  donne à Louis Blériot une renommée internationale et sa présence au Salon de l’Aéronautique de fin 1909  entraine pour la Société Blériot-Aéronautique de nombreuses commandes d’aéroplanes. Louis Blériot souhaitant ouvrir une école de pilotage choisit le terrain de Buc pour créer un site particulier, proche de Paris, pour les essais d’appareils et la formation des pilotes. Son inauguration a lieu le 13 novembre 1912.

Entrée principale de l’aéroparc de Buc (collection privée Toni Giacoia)

Un bâtiment principal, le siège de l’école de pilotage, précédé d’une porte monumentale visible de loin furent construit sur le site de l’aérodrome.  Celui ci servait aussi d’hôtel pour héberger les élèves et futurs pilotes. Des hangars et une immense tribune complètent le dispositif permettant ainsi que de nombreuses manifestations et meetings aériens soient organisés sur cet aérodrome.

Pendant la Première guerre mondiale puis dans les années 20, Le site est très actif notamment avec les avions SPAD. Avec le décès de Louis Blériot le 2 août 1936, le déclin du site s’amorce. Durant la seconde guerre mondiale  le site est occupé par les allemands et bombardé plusieurs fois en 1944 par les alliés. A l’issue du conflit, le terrain est rendu en piteux état  à la société Blériot-Aéronautique. L’activité cesse en 1966 et c’est en 1970 que la fermeture définitive intervient.

Les vestiges de la porte monumentale sont tout ce qui reste de ce passé exceptionnel et sa restauration vise donc à redonner au site toute sa valeur patrimoniale

Allée qui mène de l’entrée principale au siége/hotel de l’aéroparc
(collection privée Toni Giacoia)

Sources des informations :


Histoire du GLAM

Histoire du GLAM
Groupe de Liaisons Aérienne Ministérielles
Des ailes au service de l’État
Alain Bévillard
Pour des raisons de discrétion dans l’action politique mais aussi pour assurer un maximum de sécurité dans les voyages des présidents, ministres ou secrétaires d’États, le GLAM (Groupe de liaisons aériennes ministérielles) a offert, de 1940 à 1995, une disponibilité de tous les instants. Il a garanti les libertés de manœuvre et de réactivité indispensables au bon fonctionnement de l’État français.

Dans cet ouvrage dévoilant plus d’une centaine d’anecdotes inconnues du grand public, Alain Bévillard nous emmène au cœur de cette unité dédiée au transport des plus hautes autorités de l’État. Rendant hommage à ses serviteurs dévoués, navigants, mécaniciens ou personnels administratifs, tous professionnels de haut niveau, il permet de saisir les valeurs exceptionnelles des équipages d’avions et d’hélicoptères au fil des années.


Un seul mot d’ordre vaut pour tous au travers des décennies : réussir la mission !
L’auteur :
Alain BÉVILLARD, général de corps aérien, titulaire de la croix d’officier de la Légion d’honneur, de commandeur dans l’Ordre national du Mérite, de la médaille de l’aéronautique, totalise 7 000 heures de vol, notamment sur N2501, Transall C160, Mystère XX, Falcon 50 et Falcon 900. De 1986 à 1988, il a commandé le GLAM, unité dédiée au transport des plus hautes autorités de l’état et a été le pilote du Président de la République française, François Miterrand et de Jacques Chirac, alors premier minsitre.
Il a déjà publié la Saga du transport aérien militaire français, de Kolwezi à Masar-e-Sharif et de Port au- Prince à Dumont-D’Urville (l’Esprit du livre, 2008)

Titre : Histoire du GLAM Des ailes au service de l’État
Auteur : BÉVILLARD Alain
Editeur : Editions Privat
Format : 15 x 22 cm, broché
Nombre de pages : 540 pages, 1 cahier quadrichromie de 16 pages
ISBN : 978-2-7089-9262-7
Prix Unitaire : 20€


1932, Alex Virot assure son reportage radio en avion

Alex Virot couvre le tour de France 1932 à bord d’un Nieuport Ni.D 391 F-AIMP de la CAF

Alex Virot couvre le tour de France 1932 à bord d’un Nieuport Ni.D 391 F-AIMP de la CAF ©Jacques Hémet

Cette photo historique de qualité exceptionnelle appartient à la collection personnelle de Jacques Hémet. Il s’agit du Nieuport-Delage Ni.D 391 F-AIMP (ancien prototype du Ni.D 390) appartenant à la CAF, qui en a exploité 16 entre 1929 et 1936. C’est à la demande de la Compagnie Aérienne Française que Nieuport à développé en 1927 le NiD-39 permettant d’emmener quatre passagers et  par ailleurs la CAF a imposé le choix du moteur, un Armstrong-Siddeley Lynx IVc de 7 cylindres en étoile développant  200 ch à 1800t/min pour remplacer le gros moteur Hispano-Suiza V8 de 150 ch qui équipait initialement le prototype du Ni.D 390.

La 3eme personne à l’arrière de l’avion avec les lunettes sur les yeux est Alex Virot (1890-1957) le journaliste sportif de « l’Intransigeant ». Dès 1929, Il écrit des articles et intervient à la radio pour commenter le Tour de France cycliste.

Et pour la 1ere fois en 1932, Alex Virot couvre le Tour de France cycliste en avion. Pilote lui-même, il suit la course dans un appareil équipé de tout le matériel nécessaire à l’enregistrement de disques expédiés pour diffusion dès l’atterrissage sur Radio Toulouse, qui couvre alors un territoire allant du Maroc à l’Allemagne.
Le 14 juillet 1957, à 67 ans, alors qu’il suit le Tour de France sur l’étape menant à Ax-les-Thermes, il fait une chute mortelle en moto, son pilote Wagner décède durant le transport à l’hôpital.

Alex Virot dans le Hangar NB

Alex Virot vérifie le matériel à embarquer dans Le Ni.D 391 F-AIMP de la CAF ©Jacques Hémet

Source des informations :
Jacques Hémet
Jean-Louis Bléneau
http://fr.wikipedia.org/wiki/Alex_Virot
http://richard.ferriere.free.fr/bleneau/NiD38/NiD38.pdf
http://www.hydroretro.net/etudegh/les_avions_nieuport-delage.pdf


L’aviation légère en France 1920-1942

L’aviation légère méritait un livre !

L’aviation légère a formé des milliers de pratiquants et pratiquantes et amené de nombreux jeunes vers un métier en rapport direct avec le monde de l’aéronautique. Pourtant l’aviation légère suscite peu d’intérêt dans le monde de l’édition aéronautique, les « beaux » livres sur l’Aviation ne lui consacrent que quelques paragraphes, quand ce n’est pas quelques lignes seulement….

Depuis des années, Roger Gaborieau rêvait, au sein d’une petite structure éditoriale, de trouver un auteur qui consacrerait son talent à un travail de fond sur l’aviation légère. Car si les auteurs régionaux qui passent des années à retracer l’histoire de l’aviation font un excellent travail, celui-ci est souvent limité à leur région.
Souhaitant une vision un peu synthétique et générale de la naissance de l’aviation légère et de son développement, il décida donc de produire lui-même cet ouvrage qu’il avait envie de trouver en librairie.
Son travail a été favorisé par sa proximité avec le Musée Régional de l’Air -Espace Air Passion- d’Angers. Ce superbe musée est consacré  à l’aviation légère, ce qui fait son originalité et son intérêt. Géré par l’association  Groupement pour la préservation du patrimoine aéronautique  (GPPA), bien connu des amateurs, il conserve de belles pièces volantes ou statiques de notre « petite » aviation. Mais pas seulement. Son créateur, Christian Ravel, collecte depuis plus d’un demi-siècle, les documents, photos, manuels techniques, journaux et revues concernant le sujet.
D’abord à titre personnel, puis pour le musée, le travail de Christian Ravel a permis de créer une section « Archives et documentation » exceptionnelle et d’une richesse insoupçonnable. Une mine pour les historiens, les chercheurs, les journalistes et autres auteurs…
En plongeant dans les dizaines de milliers de photos conservées à Angers (Maine-et-Loire), Roger Gaborieau a pu trouver le fil du livre qu’il espérait si fortement. Christian Ravel et son équipe des archives du musée, son président François Blondeau, ont eu la gentillesse de l’aider en mettant à sa disposition ce matériel d’illustration et en le conseillant. Ensuite,  ce fut deux ans de travail pour Roger Gaborieau qui est prêt à vous raconter l’histoire si vous voulez bien le suivre

L’Auteur :

Roger Gaborieau, auteur de « L’aviation légère en France, 1920 – 1942″ est journaliste, pilote privé et instructeur de vol à voile, membre du Musée Régional de l’Air – Espace Air Passion – d’Angers.
Passionné d’aviation ancienne et de collection, il a participé à l’édition de plusieurs auteurs dans le domaine de l’aéronautique et acquis l’expérience du contact avec les amateurs de livres aéronautiques.

Souscription à la commande du livre :


La parution étant prévue pour le début novembre 2014,
jusqu’au 30 octobre vous pouvez faire partie des quelques privilégiés qui auront permis la publication de « L’aviation légère en France, 1920 – 1942″. Une souscription sous forme de financement participatif est en cours afin de réunir les fonds nécessaires à l’impression. En fonction du montant attribué, les souscripteurs bénéficient de quelques petits avantages tel que la newsletter, une dédicace personnalisée, une collection exclusive des marques-page « les avion légers des années 30 » ou encore la citation de votre nom dans la page de remerciement des soutiens du projet.
Pour cela, vous pouvez télécharger le formulaire Pdf et le retourner accompagné de votre règlement par chèque.

Pour plus d’informations :
http://www.aviation-legere.fr/
Formulaire de souscription


Il y a 100 ans : la première victoire aérienne de l’histoire mondiale de l’aviation

La victoire aérienne remportée le 5 octobre 1914 par le pilote Joseph Frantz et l’observateur Louis Quenault, vue par l’artiste Paul Lengellé (fait « peintre officiel du ministère de l’air » en 1936).

C’est dans le ciel de la Champagne que, il y aura tout juste cent ans dans quelques jours, s’est déroulée la première victoire aérienne de l’histoire mondiale de l’aviation, événement fondateur que la Marne, comme l’Armée de l’air, s’apprêtent à célébrer. Dans la matinée du 5 octobre 1914, un appareil allemand était en effet abattu par un biplan français à quelques kilomètres au nord-ouest de Reims.   Le Voisin type III (1) immatriculé V89 qui décolle du terrain de Lhéry (2) dans la Marne, lieu de stationnement de l’escadrille V 24 (3), au petit matin du lundi 5 octobre 1914 a reçu pour mission la reconnaissance et le bombardement d’une concentration de troupes allemandes signalées à proximité de Reims, un peu au nord du fort de Brimont. Piloté par le sergent Joseph Frantz (4) assisté de l’observateur – et mitrailleur – Louis Quenault (5), le frêle biplan parvient sans dommage au-dessus de son objectif et réussit à y larguer les six bombes qu’il a embarquées – des obus de quatre-vingt-dix millimètres empennés. Le feu nourri de l’ennemi oblige toutefois le pilote de l’avion à entreprendre une manœuvre de dégagement pour se mettre hors de portée de l’adversaire ; mais l’appareil n’a pas été endommagé et reprend la direction du terrain de Lhéry. Néanmoins, son pilote entend lui faire faire un petit détour : un survol de la vallée de la Vesle, au-dessus de laquelle il espère rencontrer un avion ennemi, ce qui lui permettrait de faire usage de l’arme dont son appareil a été équipé. Celui-ci appartient en effet à la seule formation ayant armé ses avions : la susdite V 24 (6). Une escadrille qui, à l’initiative du capitaine André Faure qui la commande et du constructeur Gabriel Voisin, a doté ses six biplans d’une mitrailleuse Hotchkiss de 8 millimètres de calibre (7).  

Deux aviateurs auréolés de gloire : Joseph Frantz (à gauche) et Louis Quenault (à droite), photographiés le 9 octobre 1914 sur le terrain de Lhéry (Marne). Les deux hommes viennent d’être décorés, respectivement, de la Légion d’honneur et de la médaille militaire par le colonel Ganter commandant l’aéronautique de la VeArmée.

Fort de son accélération, l’avion français s’approche rapidement à une centaine de mètres de l’ennemi ; un peu trop vite et pas assez discrètement sans doute puisque l’équipage du Voisin voit soudain l’Aviatik virer brutalement à gauche et accélérer pour tenter d’échapper à son adversaire. Seule alternative pour les Français : couper le virage décrit par l’avion allemand, en dépit des risques représentés par la pénétration dans l’angle de tir de l’observateur allemand. Un observateur qui, d’ailleurs, armé d’une carabine automatique à répétition, en profite aussitôt pour faire feu sur son assaillant, manquant toutefois sa cible. Fort heureusement, Joseph Frantz parvient à repositionner son appareil et le place à moins de cinquante mètres en arrière de l’avion allemand. À Louis Quenault, maintenant, de s’appliquer dans son tir et d’abattre l’appareil ennemi ! Celui-ci, appuyé sur sa mitrailleuse montée sur un trépied métallique, fait feu avec calme, préférant le coup par coup au tir en rafale afin d’éviter l’enrayage de son arme ; l’exercice est d’autant plus aisé que l’ennemi, qui tente bien de se dérober en virant continuellement, ne parvient pas à se dégager du Voisin. Les tirs du Français ne faiblissent pas, seulement interrompus une fois les vingt-cinq premiers coups tirés par la nécessité de changer de chargeur. Mais soudain, ce que Louis Quenault redoutait se produit : voilà que la quarante-septième cartouche enraye la mitrailleuse et la rend inutilisable… Le combat, dominé jusque-là par les Français, va-t-il tourner à l’avantage de l’ennemi ? Non ! Par chance, plusieurs balles ont atteint leur cible… En effet, alors que Louis Quenault a déjà commencé le démontage de la culasse de l’arme pour tenter de réparer, voilà que l’Aviatik, soudain, se cabre (12), puis retombe sur le dos et se met à adopter des mouvements totalement incohérents, suivant une trajectoire désordonnée. L’appareil, dont le pilote est blessé ou inconscient – et même peut-être mort –, n’est visiblement plus contrôlé… Peu après, l’essence embarquée prend feu. L’appareil pique vers le sol en tourbillonnant comme une feuille morte et, à l’issue d’une chute vertigineuse, vient s’écraser dans les marécages de la vallée de la Vesle, à proximité des villages de Jonchery-sur-Vesle et de Muizon.   Suivi à distance par des milliers de spectateurs – les combattants des deux camps terrés dans leurs tranchées respectives –, ce combat d’une quinzaine de minutes soulèvera l’enthousiasme des combattants français. Des combattants qui répondront au bruit sourd du crash de l’avion par une longue ovation. Sur les lieux du crash déferleront un grand nombre de curieux guidés par le nuage de fumée noire provenant de l’appareil en flammes. Puis des fantassins arriveront, qui extrairont des décombres de l’Aviatik les corps partiellement calcinés des deux Allemands (13). Un groupe d’officiers s’approchera alors, parmi lesquels le général Louis Franchet d’Espèrey (14) commandant la Vearmée, qui a personnellement assisté au combat et qui ordonnera leur mise en terre avec les honneurs militaires (15). Ayant pu atterrir à peu de distance du lieu du crash, les deux aviateurs français tenteront de gagner le point de chute à travers les marécages, ce qu’ils feront sous les acclamations. Parvenus sur les lieux, ils y apprendront que les corps des aviateurs allemands ont été retrouvés, chacun, transpercés de plusieurs balles, ce qui les rassurera : du moins ont-ils échappé à d’horribles souffrances. Le général Franchet d’Espèrey promettra alors de décorer Joseph Frantz et Louis Quenault, qui recevront quelques jours plus tard, respectivement, la croix de chevalier de la Légion d’honneur et la médaille militaire (16).   Vers onze heures, les deux Français s’envoleront pour rejoindre leur terrain de Lhéry, satisfaits d’avoir fait leur devoir… et fiers d’avoir remporté la toute première victoire aérienne de l’histoire mondiale de l’aviation. De retour sur l’aérodrome, où l’on s’est inquiété de ne pas voir rentrer l’appareil, les deux aviateurs feront connaître la grande nouvelle : « Nous l’avons eu, notre Boche ! ». Dans les jours qui suivront, deux « reliques » leur seront rapportées des lieux du crash : d’une part un morceau déchiqueté du moyeu de l’hélice de l’Aviatik (17) et, d’autre part, un lourd pistolet bi-canon en cuivre et bois (gravé au pointeau de l’inscription « B 114 »), arme vraisemblablement utilisée par l’équipage allemand pour lancer des fusées servant au réglage de l’artillerie.   Cette victoire aérienne fondatrice, les deux aviateurs français ne devaient jamais l’oublier. Pas plus que le constructeur du biplan, Gabriel Voisin, qui, bien que ne l’ayant pas « vécue », déclarera bien des années plus tard : « J’ai souvent pensé à ces deux enfants que j’ai tués avec une préméditation absolument inhumaine, car c’est moi qui avais conçu cet avion meurtrier, et cet armement presque démesuré pour notre machine. »

Auteur :Frédéric Lafarge, ancien conservateur du Musée de la base aérienne 112 et de l’aéronautique locale (Reims). Septembre 2014.  

Sources : fonds d’archives du Musée de la BA 112 et de l’aéronautique locale (actuel Musée de l’aéronautique locale de Bétheny).

Notes explicatives :  

  1. Bombardier dérivé du Voisin I construit par l’entreprise Voisin Frères de Billancourt (premier vol effectué en février 1914). Motorisation : moteur Salmson en étoile refroidit par eau animant une hélice propulsive. Dimensions : 14,75 m (envergure) x 9,50 m (longueur) x 2,95 m (hauteur). Surface alaire : 49,7 m². Vitesse maximale : 115 km/h (à altitude zéro). Plafond opérationnel : environ 3 500 m. Masse à pleine charge : 1 350 kg (à vide : 950 kg). Armement : une mitrailleuse Hotchkiss de 7,7 mm. Équipage : deux passagers (pilote à l’arrière, mitrailleur à l’avant).
  2. Commune du canton de Ville-en-Tardenois dans l’arrondissement de Reims.
  3. Escadrille dotée de six appareils commandée par le capitaine André Faure.
  4. Né le 7 août 1890 à Beaujeu (Rhône) et décédé le 12 septembre 1979 à Paris, à l’age de quatre-vingt-neuf ans. Repose au cimetière de Montparnasse dans le 14e arrondissement de paris.Koseph Frantz, grand officier de la Légion d’honneur, était titulaire de la médaille militaire, de la croix de guerre 1914-1918 et de la médaille de l’Aéronautique.
  5. Né le 2 octobre 1892 à Paris, décédé à Marseille le 26 avril 1958. Repose à Peyruis (Alpes-de-Haute-Provence).
  6. Particularité s’expliquant par le fait que les aviateurs des deux camps bénéficient dans les premières semaines de la guerre d’une « impunité tacite », les états-majors excluant tout combat entre avions, comme en témoigne notamment une communiqué du quartier général allemand daté du 1eroctobre 1914 : « Ainsi que l’expérience l’a démontré, un véritable combat dans les airs, comme l’ont décrit les journalistes et les romanciers, doit être considéré comme un mythe. Le devoir de l’aviateur est de voir et non de combattre. »
  7. Mitrailleuse qui a été équipée d’un sac permettant de récupérer les douilles éjectées lors du tir, de manière à ce qu’elle ne puissent aller heurter l’hélice en rotation.
  8. Wilhelm Schlichting, âgé de vingt-trois ans, était né à Altendorf le 8 août 1891. Il était le fils de Klaus-Heinrich Schlichting, cordonnier, et de Johanna-Augusta-Sophia née Krey.
  9. Fritz von Zangen, âgé de trente et un ans, était né à Darmstadt (Hesse) le 4 mars 1883.
  10. Avion de reconnaissance construit par Aviatik Automobil und Flugapparatefabrik entreprise fondée en 1910 à Mulhouse et transférée dès 1914 à Fribourg-en-Brisgau . Mise en service : 1914. Motorisation : moteur Mercedes D.I à six cylindres en ligne à refroidissement liquide animant une hélice tractive.Dimensions : 13,97 m (envergure) x 8,63 m (longueur) x 3,30 m (hauteur). Vitesse maximale : 105 km/h (à altitude zéro). Plafond opérationnel : environ 2 500 m. Masse à pleine charge : 1 250 kg (à vide : 825 kg). Armement : aucun. Équipage : deux passagers (pilote à l’arrière, observateur à l’avant).
  11. « Il avait une vue prodigieuse ! » témoignera Gabriel Voisin, parlant de Joseph Frantz. « [Il avait] un excellent esprit, des réflexes étonnants et, surtout, un caractère très pointilleux pour ce qui touchait au fonctionnement de la machine. » Posture qui, un très court instant, inquiètera Louis Quenault, qui redoutera que le biplan ne percute l’Aviatik, d’où une énergique tape qu’il assènera à son pilote : « Attention ! On va rentrer dedans ! »
  12. Dépouilles dont seules les jambes sont calcinées, le reste des corps ayant échappé aux flammes.
  13. Louis Félix Marie François Franchet d’Espèrey, alors général de division, né à Mostaganem (département d’Oran, Algérie) le 25 mai 1856 et décédé à Saint-Amancet (Tarn) le 8 juillet 1942, nommé commandant de la Ve armée le 3 septembre 1914. Il sera élevé à la dignité de maréchal de France en 1921.
  14. Il fera de plus expédier leurs effets personnels à leurs familles, via la Croix-Rouge. Parmi ces effets figurait une lettre que le lieutenant allemand avait écrit à sa mère et qu’il n’avait eu le temps de poster avant de décoller : « […] il y a quelques jours, nous avons rencontré un avion ennemi qui nous a tiré dessus […]. »
  15. « On me propose pour la Légion d’honneur, ça me paraît beaucoup. » écrira Joseph Frantz, au soir du 5 octobre 1914, dans son petit carnet noir ficelé à l’aide d’un élastique. Ces décorations leur seront remises le vendredi 9 octobre 1914 sur le terrain d’aviation de Lhéry par le colonel Ganter, commandant l’aéronautique de la Vearmée. La différence de « traitement » entre les deux aviateurs s’explique par le fait que Joseph Frantz possédait déjà la médaille militaire, décoration qui lui fut remise une quinzaine de jours plus tôt « pour l’ensemble des services rendus par lui depuis le début de la campagne ». Joseph Frantz et Louis Quenault seront cités au Journal officiel de la République française du dimanche 18 octobre 1914 et le texte de la citation de Frantz sera ainsi libellé : « Par décision ministérielle en date du 13 septembre 1914, la médaille militaire a été conférée au sergent Frantz, pilote aviateur, pour l’ensemble des services rendus par lui depuis le début de la campagne. En particulier, le sergent Frantz, au mois d’août dernier, avait réussi, sous le feu de l’infanterie et de l’artillerie de la garnison de Metz, à lancer deux obus sur les hangars d’aérostation de Frescati. Le 5 octobre dernier, ce même sous-officier, accompagné du mécanicien tireur Quenault, a poursuivi un aéroplane et réussi à abattre un avion allemand en reconnaissance dans les lignes françaises. Le général commandant en chef lui confère la croix de chevalier de la Légion d’honneur et décerne au mécanicien Quenault la médaille militaire. »
  16. Pièce de bois rougeâtre portant l’inscription « Heine Berlin ».

   


L’Arc-en-ciel à Toulouse-Francazal en 1933

Le Couzinet 70 « Arc-en-ciel » (F-AMBV) à Toulouse-Francazal le 20 ou 21 mai 1933 (collection privée Jacques Hémet)

Merci à Jacques Hémet qui m’a fait parvenir cette photo historique de l’Arc-en-ciel de René Couzinet sur le terrain de Toulouse-Francazal. Ce trimoteur  de 30 mètres d’envergure à l’allure élancé fait partie des engins mythiques qui ont marqué l’histoire de l’aviation. Le 20 mai 1933, il se posait sur le terrain de Toulouse-Francazal, après la traversée de l’Atlantique sud.

Le 16 janvier 1933, piloté par Jean Mermoz et accompagné par René Couzinet lui-même, le Couzinet 70 (immatriculé F-AMBV) bat le record de la traversée l’Atlantique Sud entre Saint-Louis-du-Sénégal et Natal en 14h27 pour 3200 km soit une moyenne de 221 km/h. Le retour s’effectue du 15 mai au 21 mai où l’arrivée au Bourget est triomphale devant 15 000 personnes. L’avion fut ensuite exploité par Air France jusqu’en 1937.

Le 20 mai 1933 à 17h45 Jean Mermoz, l’équipage, et René Couzinet se posent à Toulouse-Francazal et sont accueillis en héros. Le lendemain, à son départ pour le Bourget, la foule est encore présente pour féliciter l’équipage. L’Arc-en-ciel, continua de voler à titre « expérimental » sur la ligne France-Amérique du Sud, jusqu’à réaliser sa 8e et dernière traversée en 1934. un autre exemplaire fut commandé par Air France mais ne vola malheureusement pas, il ne reste aujourd’hui que des photos et un fragment de dérive de l’Arc-en-ciel de René Couzinet.

Sources des informations :


1914-2014 : la BA 102 de Dijon a 100 ans ! (2ème partie : 1940-2014)

S’il est une base aérienne historique en France, c’est bien celle de Dijon, entrée en service un peu avant la Première Guerre mondiale. Mais quelles ont été les principaux faits marquants ayant ponctué la « vie » de cet aérodrome militaire centenaire figurant depuis sa création parmi les plus importantes plates-formes aéronautiques de l’Armée de l’air ?

À compter de juin 1940 et pendant plusieurs mois, l’occupant retint sur l’aérodrome, devenu le « Frontstalag 155 », quantité de prisonniers de guerre – trente mille y furent internés – auxquels fut confiée, notamment, la remise en état des lieux. Consciente du potentiel offert par les installations de la base bourguignonne, la Luftwaffe y installa une école de perfectionnement au bombardement, unité qui, dénommée IV/KG 55 et dotée de Heinkel 111, ne devait quitter Dijon qu’au printemps 1944. Pendant toute la durée de la guerre, l’aérodrome fut le lieu d’implantation d’un état-major, celui de la Flieghorst Kommandantur 17/VII. En ce qui concerne l’infrastructure de la base, une piste en dur – qui avait été mise en chantier au tout début de 1940 – fut construite, de même que de nombreux abris camouflés d’avions ainsi que des installations de toute nature telles que des soutes à essence et à munitions. La base, également lieu de maintenance des appareils de la Luftwaffe stationnés dans l’est de la France et de ravitaillement des avions engagés dans les opérations en mer Méditerranée, se dota début 1943 de plusieurs escadrilles appartenant à une escadre dédiée à la chasse de nuit : la Nachtjagdgeschwader 4. Équipées de chasseurs moyens Messerschmitt 110 et de Dornier 217 dotés de radars de poursuite, ces escadrilles opéraient en fonction des détections effectuées localement par les stations radar de la « ligne Kammhuber », système de défense mis sur pied par l’Allemagne pour protéger son territoire.

Alors que l’activité était foisonnante sur la base, ses installations – et, avec elles, les troupes qui étaient stationnées sur l’aérodrome – finirent par être durement éprouvées, harcelées qu’elles furent par les bombardements alliés. Des bombardements conduits avec efficacité, en dépit de l’action énergique qui fut celle des batteries de défense anti-aérienne positionnées aux abords immédiats du terrain. Le premier fut celui du 28 mars 1944, au cours duquel, en cinq vagues, quantité de Boeing B-17 de la 8th Air Force larguèrent quatre cents tonnes de bombes. Aux considérables dégâts causés ce jour-là par les forteresses volantes américaines s’ajoutèrent d’autres destructions. En effet, la base eut encore à subir un raid opéré par la Royal Air Force dans la nuit du 9 au 10 avril, un mitraillage au sol particulièrement efficace réalisé le 23 avril par des chasseurs North American P-51 Mustang et un important bombardement opéré deux jours plus tard par l’aviation américaine, le tout avant que, le 14 août, l’aérodrome soit pilonné une dernière fois, par quatre-vingt-trois Consolidated B-24 Liberator. L’armée allemande dut se résoudre à évacuer la base, ce qu’elle fit le 10 septembre, après avoir pris soin de la rendre inutilisable, notamment par la destruction de sa tour de contrôle, de soutes et d’abris et de son infrastructure électrique. Il ne resta de l’aérodrome qu’un champ de ruines jonché de gravats et de ferraille et parsemé de carcasses d’avions. Dijon libérée, les troupes américaines s’emparèrent aussitôt des lieux – qu’elles redésignèrent « Y-9 » – et, après une remise en état du terrain, s’attachèrent à prolonger la piste de manière à faciliter les mouvements des unités qui, sans tarder, prendraient pied sur le site : les 111st Tactical Reconnaissance Squadron et 35th Night Fighter Squadron, ainsi que le 320th Bomb Group, unité dotée de Martin B-26 Marauder qui, de novembre 1944 à mars 1945, s’envolant de Dijon, pilonnèrent sans relâche les villes et installations stratégiques du IIIe Reich.

Si la remise en état des infrastructures de l’aérodrome demanda plusieurs années, la base – successivement dénommée « base équipée 102 » (1944), « base escale principale » (1946) et « détachement de base aérienne » (1947) – ne tarda pas, néanmoins, à renouer avec les heures fastes qui furent les siennes avant-guerre. En 1949, avec l’implantation en Bourgogne de la 2e escadre de chasse en provenance d’Allemagne, la « base aérienne tactique 102 » devint la première plate-forme de l’Armée de l’air à voir évoluer des chasseurs à réaction. Le choix de la France s’était porté sur un appareil britannique, le De Havilland 100 Vampire, avion qui, rapidement, équipa les deux escadrons relevant de la « nouvelle » escadre dijonnaise : le prestigieux escadron de chasse 1/2 « Cigognes » aux traditions puisant dans les combats de la Grande Guerre et l’EC 2/2 « Alsace ». La 2e escadre perçut toutefois dès 1953 de nouveaux chasseurs : des MD 450 Ouragan, appareils sortis des ateliers de l’avionneur Marcel Dassault, concepteur du premier chasseur à réaction de construction française. L’avion s’avéra plus performant que son prédécesseur ; malheureusement, comme pour le Vampire, la « prise en main » du nouvel appareil se traduisit par de nombreux accidents.

En juin 1955, l’emprise de la base, devenue « base aérienne d’opérations 102 », s’accrut notablement avec l’acquisition de terrains situés sur le territoire de Neuilly-lès-Dijon, ceci pour permettre la construction d’une piste en dur de 2 400 mètres de longueur répondant aux normes édictées par l’Organisation du traité de l’Atlantique nord, alliance militaire à laquelle la France avait adhéré en 1949.

Dès 1956, l’escadre dijonnaise se sépara de ses Ouragan et perçut un nouveau chasseur construit par Dassault : le MD 454 Mystère IVA. À l’automne, en toute discrétion, cet avion supersonique en piqué s’envola à destination du Proche-Orient pour y prendre part, sous les couleurs de l’aviation israélienne, aux opérations déclenchées pour reprendre le contrôle du canal de Suez, nationalisé par le président égyptien Nasser. C’est cet avion qui, à partir de 1957, équipa la Patrouille de France, formation acrobatique dont le nombre d’appareils – qui passa de cinq à douze en quelques années – stationnèrent à Dijon jusqu’au transfert de la PAF en 1962.

En 1961, un nouvel appareil fit son apparition à Dijon : l’AMD Mirage IIIC, chasseur choisi pour équiper les deux escadrons de la 2e escadre de chasse, qui fut la première formation de l’Armée de l’air à être dotée de ce fleuron de l’industrie aéronautique nationale. Premier avion supersonique français, le Mirage IIIC était même capable de vitesse bi-sonique ; il pouvait en outre, propulsé par une fusée d’appoint SEPR 841, atteindre la stratosphère pour y réaliser des missions d’interception. Le pilotage de ce chasseur à aile delta nécessitant un apprentissage approfondi, l’Armée de l’air se dota d’une unité spécialisée dans la formation et le perfectionnement des pilotes sélectionnés pour évoluer sur cet appareil, et cette mission échut à l’EC 2/2 « Côte-d’Or », escadron qui avait été recréé en 1965 et auquel fut confiée l’année suivante la mission de « transformation opérationnelle » de l’ensemble des pilotes de chasse de l’Armée de l’air affectés au sein d’unités dotées de Mirage III. À cet effet, cette unité perçut des biplaces Mirage IIIB, conservant néanmoins plusieurs monoplaces pour le « lâcher » des pilotes en solo. Ce fut, pour la base dijonnaise, le point de départ d’une nouvelle aventure : celle d’abriter un escadron qui ne tarderait pas à être qualifié d’ « Académie de la chasse ». Une académie qui formerait également quantité de pilotes et de mécaniciens venus du monde entier…

En décembre 1965, les installations civiles jouxtant l’aérodrome militaire, elles aussi en plein développement, virent le lancement officiel d’une compagnie aérienne régionale : Air-Bourgogne. Quelques mois plus tard débuta sur la BA 102 le tournage d’une série télévisée qui, par son succès, permit à la base dijonnaise – et à ses aviateurs – d’être connue de tous les téléspectateurs français : Les Chevaliers du Ciel, série adaptée d’une bande dessinée créée par Jean-Michel Charlier, scénariste, et Albert Uderzo, dessinateur, narrant les exploits des lieutenants Tanguy et Laverdure.

En 1968, une version plus moderne du Mirage III fut livrée aux escadrons dijonnais : la version E, dotée d’un radar Doppler permettant la navigation à basse altitude par tout temps.

Le 2 juillet 1984, un demi-siècle jour pour jour après la création de l’Armée de l’air, un nouvel oiseau fit son nid sur la BA 102 : le Mirage 2000 C, dernier-né des chasseurs produits par l’avionneur Marcel Dassault, appareil que cette base fut la première à mettre en œuvre. Son évolution ultime, le Mirage 2000-5F, devait faire son apparition en Bourgogne quinze ans plus tard, en 1999, permettant aux aviateurs de la BA 102, au tournant du siècle, de disposer de l’un des plus redoutables chasseurs de la planète, capable par sa technologie et son système d’armes de détecter simultanément jusqu’à vingt-quatre cibles et de « traiter » les huit plus menaçantes. Un avion que piloterait notamment Caroline Aigle, la première femme pilote de chasse de l’Armée de l’air, affectée à Dijon en 2000.

En 2008, après avoir envisagé la fermeture de la BA 102, les autorités gouvernementales décrétèrent finalement son maintien et, localement, l’on s’efforça de renforcer l’aérodrome dijonnais. À cet effet, le projet Renaissance fut lancé, avec pour ambition de développer l’aéroport de Dijon-Bourgogne par l’accroissement de son activité aérienne, tant civile que commerciale. Malgré tout, à l’été 2011, les derniers Mirage présents à Dijon – ceux de l’escadron de chasse 1/2 « Cigognes » – furent transférés sur la base aérienne 116 de Luxeuil, et il ne resta plus sur le site militaire qu’une quinzaine d’appareils : les Alphajet de l’escadron d’entraînement 2/2 « Côte-d’Or », unité sans équivalent dans l’Armée de l’air qui avait été créée quelques années plus tôt pour maintenir en condition opérationnelle les pilotes de l’ensemble des escadrons de la chasse française. Des appareils qui, dans les derniers jours de juin 2014, cent ans très exactement après l’arrivée sur l’aérodrome de ses tout premiers avions, s’envoleront pour un aller qui sera sans retour à destination de la base aérienne 120 de Cazaux, laissant seuls sur l’aérodrome les deux avions de liaison TBM 700 mis en œuvre par le dernier des escadrons à être stationné sur la base : l’escadron de transport 41 « Verdun ».

En dépit de ce transfert qui entraînera la fermeture des installations aéronautiques mises en œuvre par la plate-forme militaire, la base aérienne dijonnaise, plate-forme « à part » au sein du dispositif des bases mis en œuvre par l’Armée de l’air, conservera – mais pour combien de temps ? – plusieurs « spécificités ». Parmi elles, celle d’être le lieu d’implantation de formations elles aussi uniques en leur genre, à savoir l’un des commandements organiques de l’Armée de l’air (le commandement des forces aériennes, transféré en 2012 en provenance de Metz), l’un des trois commandos parachutistes dont dispose l’Armée de l’air (le CPA n° 20, unité forte de trois cents hommes installée à Dijon depuis 2008), l’unité chargée de la formation de l’ensemble des fusiliers commandos de l’Armée de l’air (l’escadron de formation des commandos de l’air 08.566), la structure chargée de former l’ensemble des spécialistes œuvrant sur le Mirage 2000 (l’unité d’instruction spécialisée 62.530) et l’organisme chargé de l’exploitation et de la conservation des informations personnelles – individuelles ou collectives – du personnel servant et ayant servi au sein de l’Armée de l’air (le bureau des archives et des réserves de l’Armée de l’air 24.501).

De 1914 à 2014, ce sont bien cent ans d’une vie trépidante qui auront rythmé l’existence de la base aérienne 102, entrée en service en tant que « camp d’aviation ». Cent ans d’une activité foisonnante qui se sera tout bonnement confondue avec une autre palpitante aventure humaine et technologique : celle de l’Armée de l’air !

Frédéric Lafarge
chargé de relations publiques
et délégué au patrimoine historique de la BA 102