Un grand merci à Pierre Peyrichout pour avoir mis à ma disposition ce vinyle 33 tours « L’Atlantique Sud de l’Aéropostale à Concorde » .

Ce disque édité, il y a 50 ans a été conçu et réalisé par la Compagnie Nationale Air France lorsqu’elle préparait en Amérique du sud une exposition rétrospective en hommage à ses précurseurs. Gérard Civet ayant réalisé la sonorisation et Julien Bonny, la maquette.

Cet enregistrement est constitué par les récits de onze témoins qui vécurent entre 1918 et 1933, la conquête aérienne de l’Atlantique Sud

  • Jean-Gérard Fleury, écrivain et journaliste auteur de « La Ligne »ouvrage le plus complet de l’aéropostale complet paru sur le sujet, évoque les débuts de l’Aéropostale à l’époque où les avions volaient à 150 km à l’heure et à 500 mètres d’altitude. Témoin des grands moments de cette épopée, il a bien connu Mermoz, Saint-Exupéry, Didier Daurat, Delaunay et vécu jusqu’à Concorde les progrès fabuleux de l’aviation. Il raconte comment l’Aéropostale fut à l’origine du développement de l’aéronautique au Brésil, en Argentine et au Venezuela et rapporte des anecdotes inédites.
  • Léon Antoine pilote de guerre, ancien pilote d’Air France, n’a rien oublié de ses premiers vols à la Société des Lignes Aériennes Latécoère en 1926 … Avec son franc parlé, Antoine raconte ses débuts avec Daurat, ses pannes moteur, les « salades de bielles des avions de l’époque. Mermoz, Reine, Etienne, Delaunay, Guillaumet étaient ses amis. Il donne du héros une définition à laquelle personne n’avait pensé.
  • Jean Macaigne officier-radio a bord de l’aviso « Péronne » fut le premier témoin du transport de la poste par voie maritime entre Dakar et les côtes du Brésil, c’était au début de mars 1928 le relais qui donnait à la Ligne sa complète raison d’être. Radio-navigant à bord des avions de l’Aéropostale, son rôle fut important dans le développement du réseau sud-américain. Pour lui aussi Daurat fut un homme extraordinaire, le chef incontestable.
  • Consuelo de Saint-Exupéry raconte comment après avoir rencontré à Buenos Aires le « patron » de l’Aéropostale en Argentine elle reçoit de celui-ci une lettre de 83 pages et une demande pressante. Ce texte paraîtra en librairie sous le titre de « Vol de nuit » au moment de leurs fiançailles à Paris. Pour Saint-Ex., dit-elle, l’avion était un objet destiné à mesurer les obstacles et à essayer de pénétrer les secrets de la Terre.
  • Antoine de Saint-Exupery qui fut pilote et directeur de l’Aéropostale en Argentine, « métier fertile » entre tous présente ici son nouveau livre d’alors « Terre des Hommes », recueil de souvenirs et de témoignages » qu’une longue pratique professionnelle a accumulés non seulement sur le pilote mais aussi sur l’homme lui même.
  • Joseph Kessel de l’Académie Française, se souvient de deux heures d’angoisse alors qu’en 1929, à bord d’un Laté 25 avec Emile Lécrivain et Edouard Serre, ils volent de Cap Juby à Villa Cisneros: une tempête s’abat sur le désert, et le survol du littoral à un mètre au-dessus des flots devient périlleux. C’est une évocation de « Vent de sable » par l’auteur de « Mermoz » qui fut le grand narrateur de l’Aéropostale et de ses hommes.
  • Jean Mermoz s’entretient avec Joseph Kessel. C’est l’un des très rares documents sonores qui permet, malgré l’imperfection de la gravure originale d’entendre la voix de Mermoz. Joseph Kessel vient de lire dans un hebdomadaire de l’époque, les confidences faites par Mermoz au journal « Confession » et lui fait part de son émotion. Cet article révèle dans quelles conditions précaires il vivait à l’époque à Paris pour gagner sa vie alors qu’il avait l’expérience de 600 heures de vol. Et Mermoz ne regrettait rien des corvées qui s’imposaient à lui pour survivre a Paris après son service militaire.
  • Lucien Gambade fait avec humour le récit de son premier vol sans visibilité à bord d’un Bréguet 14. Au retour d’un courrier d’Alicante, peu après Lézignan, Gambade, que le mauvais temps oblige à voler très bas, perd de vue la voie ferrée, son seul point de repère… a l’entrée d’un tunnel, ce qui le contraint a prendre de l’altitude pour éviter les montagnes avoisinantes. Dans les nuages l’avion évolue sans direction puis retrouve providentiellement sa route. Les oiseaux ne volent pas dans les nuages dit-il, pourquoi irions-nous ?
  • Jean Dabry qui fut le premier navigateur aérien de l’Aéropostale composait avec Mermoz et Gimié le premier équipage à avoir franchi l’Atlantique Sud. C’était le 12 mai 1930, à bord d’un monomoteur Laté 28 équipé de flotteurs. Entre Saint-Louis du Sénégal et Natal, la traversée dura 21 h 10. Pour la première fois la poste était transportée complètement par voie aérienne de Toulouse à Santiago du Chili. Le Commandant Dabry raconte comment l’entreprise fut réussie après de minutieux préparatifs.
  • Didier Daurat « le Patron », explique les origines de la Ligne créée à Toulouse, en 1918 dans l’esprit de Pierre Georges Latécoère. En réponse à certaines critiques, il justifie son attitude de fermeté devant les hommes. Celui qui avait « le don du chef » montre comment ce qui paraissait impossible est devenu possible grâce à un nouveau type d’hommes.
  • Le Père Pierre Secondi Dominicain établi au Brésil depuis 1931, a vu les équipages au travail et eut pour eux une grande admiration. Il apporte sa part du témoignage et conclut ce document sonore par des souvenirs personnels d’une époque où les machines étaient presque humaines tant elles étaient soumises à la volonté de leurs pilotes.

Pour les passionnés d’aviation que vous êtes, je suis sûr que vous écouterez avec émotion ces enregistrements qui prouvent à quel point ces hommes étaient motivés pour remplir leur mission tout en étant aussi simples que vous et moi. Oui, ils sont des héros des temps modernes, mais selon la définition du héros donnée par Léon Antoine : « Être un héros, c’est être le seul à savoir qu’on a eu peur. »